Après une retraite bien méritée en 2002, qu’a fait M. Cesare Maldini ?
J’ai arrêté le métier d’entraîneur, alors que j’avais 70 ans. C’était à la fin de la Coupe du monde 2002 avec le Paraguay et je n’avais vraiment plus envie de travailler. Aujourd’hui, je coule une retraite heureuse, mais cela ne m’empêche pas d’avoir beaucoup d’activités. Je partage mon temps entre mon nouveau métier de consultant à Al Jazeera, le Milan AC et ma famille. Vous voyez bien que je ne m’ennuie pas du tout.
Que pouvez-vous nous dire de ce début de Coupe du monde ? Comment l’avez-vous trouvé ?
C’est un début timide, mais je m’y attendais un peu. Les équipes entament une telle compétition en ayant peur de se louper dès le départ, d’où les tactiques frileuses des uns et des autres. Il y a eu toutefois quelques beaux matchs qui me permettent de croire que la Coupe du monde va bientôt décoller.
Quel est le plus beau match que vous avez commenté depuis le début de la compétition ?
Ce n’est pas parce que je suis en face d’un journaliste algérien, mais j’ai beaucoup apprécié le match Angleterre-Algérie. C’était un excellent match tactique avec beaucoup d’engagement. Je n’avais pas l’impression d’assister à une rencontre entre un candidat au titre et une équipe qu’on n’a plus revu plus en Coupe du monde depuis longtemps.
Qu’avez-vous aimé dans cette équipe algérienne ?
Son organisation défensive presque parfaite, la maîtrise technique et la condition physique des joueurs. J’avais l’impression de voir une équipe italienne sur le terrain.
En Algérie, on est même allés jusqu’à dire que le sélectionneur algérien M. Saâdane a administré une leçon tactique à Capello…
Non, il ne faut pas aller jusqu’à dire ça. L’Algérie a joué à l’italienne certes, mais il y avait quand même quelques failles qui ont permis aux Anglais de se créer quelques occasions.
Quels sont les joueurs qui ont attiré votre attention ?
J’ai aimé « el picolino » (Ndlr. Le petit) avec le numéro 15. Il est vif, rapide et il est très difficile de lui prendre le ballon. L’attaquant de pointe m’a aussi beaucoup plu, il a beaucoup gêné les défenseurs anglais par ses appels de balles et sa mobilité. Mais ce qui m’a le plus plu, c’est la synchronisation parfaite entre les quatre défenseurs, ils sortaient tous ensemble et repliaient tous ensemble. Comme un seul homme.
Capello a dit à la fin du match qu’il était surpris par l’organisation défensive des Algériens. Et vous ? L’avez-vous été ?
Oui, bien sûr. Je ne vous cache pas que sur le plateau d’Al Jazeera et juste avant le match, j’étais un peu pessimiste pour l’Algérie. Je me demandais comment les Algériens allaient faire pour arrêter la machine anglaise. Finalement, j’ai été surpris comme Capello et comme tout le monde. Agréablement surpris.
Pensez-vous que l’Algérie peut se qualifier au second tour ?
Vous savez, je ne suis pas un divin, mais si l’Algérie joue comme face à l’Angleterre, elle pourra poser des problèmes à tous ses adversaires. L’atout des Algériens c’est qu’ils n’auront rien à perdre durant cette Coupe du monde. Après ce que j’ai vu face aux Anglais, je peux dire que l’Algérie a ses chances.
Que se passe-t-il avec l’Italie. Pourquoi les Italiens entament toujours mal la Coupe du monde ?
« Chi va piano, va sano » dit un proverbe italien. Il vaut mieux commencer difficilement et terminer en force que le contraire. Mais cette fois-ci, je ne suis pas très optimiste parce qu’il y a un gros problème au sein de cette équipe. Le sélectionneur a pris cinq joueurs de la Juve, alors que tout le monde sait que cette équipe sort d’une saison négative sur tous les plans. Lippi croit en eux, j’espère seulement qu’ils vont lui donner raison. C’est finalement lui le premier responsable et on doit tous respecter ses choix.
Vous avez été sélectionneur de la Squaddra Azzura durant deux ans. Convoquer votre fils et le titulariser vous posait-il problème ?
Pas du tout. Paolo a été le meilleur à son poste durant de longues années. La preuve, il faisait déjà partie de l’équipe avant mon arrivée et il y était resté longtemps après mon départ. Lorsqu’il a commencé à jouer au football, oui, j’ai eu des problèmes parce qu’on disait qu’il jouait parce qu’il était le fils de Cesare. Mais Paolo a vite prouvé à tous qu’il était le meilleur.
Paolo sera-t-il entraîneur un jour ?
Non, parce qu’il n’aime pas le métier d’entraîneur. Il a pourtant la personnalité pour. Tant mieux, comme ça on ne dira pas qu’il est devenu entraîneur grâce à son père (rire). Pour le moment, il se repose et il profite un peu de sa famille, mais je le vois comme dirigeant au Milan AC ou à la Fédération italienne. Le dernier choix lui revient.
Quels sont selon vous les favoris pour remporter la Coupe du monde ?
Pour moi, il y a les Brésil et les autres. Le Brésil a toujours bien joué devant et au milieu, mais cette fois-ci, sa plus grande force, c’est la défense. Le gardien de but, Maicon l’arrière droit et Lucio l’arrière central jouent tous les trois à l’Inter. Ils s’entendent bien, ils sont en confiance après avoir tout gagné en club et ils sont surtout excellents. Il sera difficile de passer cette défense. Je pensais sincèrement que l’Angleterre allait bousculer la hiérarchie, mais après ce que j’ai vu contre l’Algérie, j’ai changé d’avis.
Y a-t-il eu des surprises à part l’Algérie ?
Oui, le Chili. J’ai commenté le match Chili-Honduras et j’ai été agréablement surpris par le jeu des Chiliens. Ils ont un entraîneur que j’admire particulièrement, Marcelo Bielsa, des joueurs jeunes mais qui ont de la qualité.
Et la Suisse…
J’ai vu le match Suisse-Espagne et j’avoue que la surprise a été pour moi l’attitude des Espagnols qui ont joué avec une certaine auto-suffisance. Je crois que les joueurs espagnols ont sous-estimé les Suisses. Cela ne pardonne pas quand vous avez en face un entraîneur comme Ottmar Hitzfeld. Il leur a mis deux rideaux défensifs et des attaquants très rapides qui leur ont posé beaucoup de problèmes. Si elle veut faire partie des meilleures, l’Espagne doit faire preuve de beaucoup plus d’humilité.
Pensez-vous qu’il y aura plus de spectacle durant cette Coupe du monde ?
Oui, mais à partir des 8es de finale. Le premier tour, les équipes font des calculs pour ne pas rentrer bredouilles chez elle. Mais une fois qu’elles atteignent les 8es et avec l’élimination directe, elles doivent ouvrir le jeu pour chercher à marquer. Et là, on verra du beau football, en tout cas meilleur que ce qu’on a vu jusqu’à présent.
Quand on vous parle de l’Algérie, quelle est la première chose qui vous vient en tête ?
Que c’est un pays que je n’ai jamais visité et ce n’est pas normal. Grâce au football, j’ai parcouru le monde entier, j’ai vu des dizaines de pays, mais jamais l’Algérie qui n’est pourtant pas loin de l’Europe. Vous devez m’y inviter un jour.
Oui et avec plaisir. Un mot pour les supporters algériens avant de clore cet entretien ?
Je leur demande juste d’être fair-play et de donner la meilleure image de votre pays à l’étranger. Vous savez, en Coupe du monde, il y a la presse du monde entier et elle voit tout et écrit tout. Donc, il vaut mieux qu’elle écrive de belles choses sur les supporters algériens qui ont été formidables lors du match Angleterre-Algérie.